Enchaînée tel un animal, un collier au cou, des bracelets aux chevilles. Oh, on pourrait voir les choses ainsi ; ce qui t'incarcère n'est que bijou et beauté. Pourtant, tes menottes ne t'ont jamais faits aussi mal, dans ta tête, elles sont une honte, une honte bien dure à avaler. Tu aimerais l'enlever, ce futile acier. Et c'est ce que tu fais, chaque nuit, lorsque les gardes s'endorment peu à peu, lorsque la Belle blanche illumine ta cellule, ta chambre, ta cage. Tes mains tirent sur les racines de ta prison, le cliquetis des chaînes résonne sur les murs en pierre, une pierre un peu froide, une pierre du désert, ton désert qui tentait par tous les moyens de t'empêcher de t'enfuir. Il t'a vu naître, et il ne souhaite certainement pas te voir partir. Qu'importe le désert, même si tu l'aimes, oui qu'importe ! Car pour le moment, il faut penser à toi et à ta survie, à ta liberté souhaitée.
Il fut un temps où tes cheveux n'étaient pas autant en bataille, où tes vêtements n'avaient pour seules tâches quelques grains de sable, où ton corps même emporté par le vent du désert dansait dans un combat, combattait dans une danse. Mais ce temps-là, je me demande s'il est révolu, qu'en penses-tu, princesse gérudo ? Contons donc ce physique qui perdure en toi, qui n'a pas disparu grâce à tes efforts pour ne pas perdre ton calme et ta rationnalité. Oui, car malgré ton épingle tordue à force de l'utiliser dans l'espoir de défaire tes menottes, malgré ton visage fatigué par les nuits à ne dormir qu'à demi, tu essaies de garder ta physionomie caractéristique, tu essaies et cela se remarque tant et plus.
Ta situation est si précaire, Nabooru, elle pourrait en désespérer plus d'un, mais toi, oui, toi, sage de l'Esprit, tu ne courbes pas l'échine, au contraire, tu te tiens droite. Droite comme un i. Qu'importe le poids qui pèse sur tes épaules, ta tête reste haute, ton regard implacable, et tes chaînes auront beau faire pour te tirer vers le bas, tu te noieras sans laisser la moindre once de désespoir animée tes iris. Oui, tu resteras droite toute l'éternité s'il le faut, quitte à te briser la colonne.
Tes bracelets d'or enserrent tes avant-bras, ils brillent, ils scintillent froidement, tu en prends soin, presque mieux que toi. Oh, je pourrais te décrire comme sale et pleine de suie et de saleté, nageant dans ta propre merde, et pourtant...Par je ne sais quelle magie, ta peau dorée est douce, soignée, lavée, comme à ton accoutumée lorsque tu étais libre. Oui, tu n'as pas l'air si amaigrie que cela, finalement, peut-être parce que tu es emprisonnée depuis peu, ou bien parce que l'on te nourrit, que l'on prend soin de toi ? Je penche plutôt pour la courte durée, car après tout, dans le coeur de ton peuple, tu es quelqu'un de respecté, mais tu es aussi la traîtresse, celle qui abandonne son peuple et son roi Ganondorf, alors...Oh, à quoi bon se questionner sur la complexité de la situation ! Tu serres les mâchoires en repensant à ce visage, à cet homme que tu aimerai ô combien faire tomber de son piédestal. Pour toi, il ne peut être roi, il ne peut faire régner sa suprémacie, il faut l'en empêcher, pour sauver le désert que tu adules, pour aider ton peuple si cher.
Il ne faut plus penser, il faut agir. Alors tu agis, tandis que tes cheveux lâchés se fondent en cascade dans ton dos et autour de ton visage, d'un rouge dur et froid sous la lumière nocturne. Non...Pas rouge, carmin. Oui. Carmin. Un voluptueux carmin. Tu n'aimes pas que l'on dise rouge, tu préfères le carmin, le rubis carmin. Une jolie pierre que tu portes d'ailleurs autour de ton cou, ses attaches d'or et d'argent aux courbes arabesques effleurant ta peau, se voilant peu à peu de l'acier de tes chaînes. Des chaînes bien irritantes.
Tout autant que tes cheveux et ta peau sont soignés, tes vêtements restent les mêmes. Ils ne font pas encore pensés à une souillon, ni même à une femme de haut rang. Ils sont un peu usés, à force de te mettre constamment à genoux pour tenter de desceller tes menottes. Ton pantalon un peu bouffant commence à se déchirer au niveau de tes articulations. Ton haut, maintenant une poitrine assez conséquente dûe à tes origines, découvre impudiquement ton ventre, un ventre plat, un peu maigre désormais. Ces bouts de tissus ne changent pas malgré les années, par contre, ce qui a certainement changé, c'est peut-être l'absence de tes deux sabres, tes petits chéris, enfermés quelques part où tu ne pourras les reprendre, comme ton voile noir cachant normalement ton visage.
Parlons-en, de ce visage, de ce corps fait pour la rapidité et l'agilité. Tu es souples de nature, tes bras longs savent bien t'aider, comme tes jambes à la grandeur peu ordinaire. La cambrure de ton dos, les quelques cicatrices ornant ta peau, ta démarche féline, ô et n'oublierais-je pas ton visage fin et quelque peu taillé au couteau ; nul doute, il s'agit des principales caractéristiques te définissant comme une gérudo, une de ces voleuses du désert, une femme grande, impudique, aux airs orientaux et surtout à la dangerosité légendaire.
Terminons par ton visage, oui, j'ai du l'omettre, un peu trop fasciné par ta férocité quant à agir pour te libérer...Bref. Taillé au couteau, souvent impassible et honorable, il reflète tes émotions, comme tout à chacun. Parfois, un sourire l'orne, tirant un peu plus tes pomettes hautes, plissant tes yeux en amandes, des iris d'un beau velouté, aussi flamboyant que ta crinière ; une gérudo jusqu'à la fin. Ton nez est un petit peu long, tes lèvres pulpeuses, ton front haut, et tes joues légèrement creuses, sans pour autant faire disparaître tout charme de ton faciès. Tu es charismatique, Nabooru, tu es féline et aérienne, tu es têtue et malgré tout droite dans tes actes, tu tiens à ton honneur, tu tiens à ton peuple, tu tiens à ta liberté. Que l'on t'enlève l'un des trois, ton regard se fera de glace, féroce et meurtrier, et cette manière d'agir, on la remarque immédiatement dès que l'on ouvre la porte de ta géôle, car après tout...On t'a enlevé les trois, n'est-ce pas ?
Nabooru, implacable Nabooru.